Clause de suspension des paiements des loyers et Covid-19
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Une interprétation littérale de la clause de suspension de paiement des loyers applicable en cas de “survenance de circonstances exceptionnelles et graves (…) affectant le bien”
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Le bail stipulait la clause suivante : “Dans le cas où la non sous-location du bien résulterait (…) de la survenance de circonstances exceptionnelles et graves (…) affectant le bien et ne permettant pas une occupation effective et normale, (…), le loyer (…) ne sera pas payé jusqu’au mois suivant la fin du trouble de jouissance”.
Le preneur invoquait la crise du Covid-19 et les mesures gouvernementales y relatives pour justifier du non-paiement des loyers.
La Cour de cassation, estimant la clause précitée suffisamment claire, retient que le contexte sanitaire n’a pas affecté les biens loués “eux-mêmes” mais leurs conditions d’exploitation, de sorte que la Cour d’appel a justifié sa décision d’ordonner au preneur le versement par provision des loyers.
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Abattement de la valeur locative en cas de transfert au preneur de la taxe foncière
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La Cour de cassation vient réaffirmer que le transfert au preneur du montant de la taxe foncière justifie un abattement de la valeur locative dans le cadre de la fixation du loyer de renouvellement.
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Dans le cadre d’une procédure en fixation du loyer de renouvellement, le preneur invoquait en cause d’appel que le transfert au preneur des obligations incombant normalement au bailleur (au cas particulier le paiement de la taxe foncière), justifiait un abattement sur la valeur locative.
La Cour d’Appel n’avait pas fait droit aux prétentions du preneur, au motif que “le fait que le preneur se soit engagé à acquitter les taxes foncières ne justifie pas un abattement pour charges exorbitantes, dès lors, d’une part, que ce transfert de charges est couramment pratiqué dans le secteur, d’autre part, que les termes de comparaison retenus par l’expert correspondent à des baux mettant la taxe foncière à la charge du preneur“.
La Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel en retenant que le paiement de la taxe foncière incombant normalement au bailleur, le transfert de cette obligation au preneur justifie, par lui seul, un abattement sur la valeur locative. La Cour de cassation persiste et signe, de sorte que le montant de la taxe foncière continuera, pour un moment encore, à être déduit du montant de la valeur locative en renouvellement.
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Cession de fonds de commerce et défaut d’imputabilité au cessionnaire des motifs graves et légitimes imputables au cédant pour refuser le paiement d’une indemnité d’éviction
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Si le bailleur délivre congé sans offre d’indemnité d’éviction et que le preneur cède ensuite son fonds de commerce, le bailleur ne pourra reprocher au cessionnaire que des manquements qui lui sont personnellement imputables, peu importe que le congé ait été délivré avant la cession.
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A la suite de nombreux impayés de loyers et charges, un bailleur avait signifié à son preneur un congé comportant refus de renouvellement et de paiement d’une indemnité d’éviction pour motifs graves et légitimes. Le preneur avait ensuite cédé son fonds de commerce.
Le cédant et le cessionnaire ont assigné le bailleur en paiement d’une indemnité d’éviction.
La Cour de cassation a confirmé la décision d’appel qui avait retenu que le bailleur ne pouvait invoquer contre le cessionnaire que des faits personnellement imputables à ce dernier et non ceux commis par le cédant, de sorte que le refus de paiement d’une indemnité d’éviction n’était pas justifié.
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La Cour d’Appel de Paris confirme une jurisprudence désormais bien établie en présence d’une clause d’indexation ne jouant qu’à la hausse
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Aux termes de cette décision, la Cour d’Appel de Paris adopte une appréciation stricte de la coïncidence devant exister entre la période de variation de l’indice et la durée écoulée entre chaque révision, vient rappeler que la divisibilité de la clause d’indexation n’est pas automatique.
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Dans cette affaire, un bail ayant pris effet le 6 avril 2003 et modifié par voie d’avenant, prévoyait :
- une indexation annuelle au 1er janvier de chaque année et, pour la première fois, le 1er janvier 2006 ;
- une clause dite “tunnel” libellée en ces termes : “le bailleur consent au preneur la mise en place d’un “tunnel” dont la prise d’effet interviendra rétroactivement à compter du 1er janvier 2009. C’est ainsi que les parties conviennent de modérer les effets de l’application de la clause d ‘échelle mobile prévue au bail du 31 décembre 2003 dans un « tunnel » ayant pour plancher minimum 1,5% (un et demi pour cent) et pour plafond 3,5% (trois et demi pour cent). Il en résulte que l’actualisation du montant du loyer sera celle résultant de l’application de ladite clause avec un minimum de révision fixé à 1,5% et un maximum à 3,5%”.
Le preneur fait assigner son bailleur en nullité de la clause d’indexation.
Sur la périodicité de la clause d’indexation, la Cour d’appel de Paris la répute non écrite en ce qu’il n’y a pas de coincidence entre la période de variation de l’indice (3 ans) et la durée de la révision (2 ans 8 mois et 25 jours).
Sur l’encadrement de la clause d’indexation, la Cour d’appel la répute également non écrite au motif qu’en prévoyant un plancher minimum de 1,5%, le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse, ce qui fausse donc le jeu normal de l’indexation dont le propre est de faire varier le loyer tant à la hausse qu’à la baisse.
A noter que ces deux clauses sont réputées non-écrites dans leur intégralité, la Cour d’appel retenant dans les deux cas l’impossibilité de procéder à une divisibilité de la clause puisque :
- pour la clause initiale, elle ne peut survivre sans la suppression de la mention relative à la première indexation ;
- pour la clause modifiée par avenant, la suppression du membre de phrase relatif à la création du tunnel et de l’indexation uniquement à la hausse ne permet aucunement d’indexer le loyer autrement.
Enfin, pour le remboursement des sommes dues, la Cour d’appel de Paris considère que la répétition de l’indu doit être calculée non pas à partir du loyer initial, mais du loyer acquitté à la date du point de départ du délai de prescription.
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TABIF : la CAA de Paris refuse la qualification commerciale à des locaux affectés à une activité de coworking
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Dans un arrêt du 15 mars 2024, la Cour Administrative d’Appel a annulé le jugement du Tribunal Administratif de Paris qui avait jugé que les locaux affectés à une activité de mise à disposition d’espaces de « coworking » pouvaient être regardés comme utilisés pour la réalisation de prestations de services et donc être qualifiés de locaux commerciaux (et non de surfaces de bureaux) si un certain nombre d’indices étaient réunis.
Pour mémoire, la qualification commerciale est très avantageuse au regard de la TABIF dont les tarifs sont plus bas et les seuils plus hauts qu’en matière de bureaux. |
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La Cour relève dans cet arrêt d’espèce notamment que « la description sur le site internet de la société des prestations offertes à la clientèle, la production du contrat de prestations de service conclu avec les clients ainsi que des conditions générales de vente ne permettent pas de rapporter la preuve de l’importance quantitative de telles prestations et d’établir qu’elles revêtiraient autre chose qu’un caractère accessoire à l’activité principale de la société Deskopolitan consistant à fournir à ses clients des locaux à usage de bureaux. »
Cet arrêt, n’interdit pas le principe de la qualification de locaux commerciaux pour des locaux de coworking. Toutefois, en pratique, une telle qualification ne devrait être possible que si les prestations offertes ne sont pas accessoires.
En l’état actuel des offres, il nous semble difficile de défendre que la fourniture de locaux à usage de bureaux puisse ne pas être l’activité principale des sociétés de coworking.
CAA Paris, 15 mars 2024, n° 23PA00132
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