Droit de l’urbanisme et de la propriété publique — Actualités
PERMIS DE CONSTRUIRE — contentieux — intérêt à agir — absence de titre (NON)
Le demandeur qui a présenté une offre d’acquisition du terrain d’assiette du projet critiqué au prix fixé par la collectivité publique venderesse et saisi le tribunal judiciaire pour qu’il juge parfaite la vente à son profit ne présente pas un intérêt à agir suffisant contre le permis de construire y afférant : CE, 25 janv. 2023, n° 445937, Sté Touche Automobiles, Lebon T.
PERMIS DE CONSTRUIRE — procédure d’instruction — demande illégale de pièces complémentaires — permis tacite (OUI)
Une demande illégale de pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de construire n’a pas pour effet d’interrompre ou de modifier le délai d’instruction. Par conséquent, en rupture totale avec sa jurisprudence antérieure, le Conseil d’Etat considère que le pétitionnaire peut se prévaloir d’un permis tacite à l’issu du délai d’instruction initial : CE, 9 déc. 2022, Cne St-Herblain, n° 454521,
PERMIS DE CONSTRUIRE — modificatif — champ d’application par rapport à un nouveau permis de construire
Les conditions permettant la délivrance d’un permis de construire modificatif en lieu et place d’un nouveau de permis ont été assouplies par rapport aux exigences fixées par la jurisprudence antérieure. Désormais, selon la formule employée dans l’arrêt du Conseil d’Etat du 26 juillet 2022 : « l’autorité compétente, saisie d’une demande en ce sens, peut délivrer au titulaire d’un permis de construire en cours de validité un permis modificatif, tant que la construction que ce permis autorise n’est pas achevée, dès lors que les modifications envisagées n’apportent pas à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même ». Ainsi, à la condition fixée précédemment tenant à ce que les modifications ne remettent pas en cause la « conception générale » du projet initial, est substituée celle tenant à ce que les modifications ne changeant pas la « nature » du projet. Le champ matériel du permis modificatif s’en est trouvé aligné sur celui des mécanismes de régularisation sous l’égide du juge prévus par le code de l’urbanisme (art. L.600-5 et L.600-5-1) : CE, Section, 26 juillet 2022, n°437765, Lebon.
PERMIS DE CONSTRUIRE — régularisation d’un permis de construire illégal — changements dans les circonstances de fait (OUI)
Lorsqu’une autorisation d’urbanisme a été délivrée en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’utilisation du sol, elle peut être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l’utilisation du sol qui était méconnue par l’autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l’effet d’un changement dans les circonstances de fait de l’espèce. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’autorisation initiale : CE, 10 oct. 2022, Sté Territoire Soixante-deux, n° 451530.
LUTTE CONTRE L’ARTIFICIALISATION DES SOLS : décret n° 2022-1673 du 27 décembre 2022 portant diverses dispositions relatives à l’évaluation environnementale des actions ou opérations d’aménagement et aux mesures de compensation des incidences des projets sur l’environnement
Les décrets d’application de la loi n°2021-1104 du 22 aout 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience dite « loi climat et résilience » continuent d’être promulgués.
Ainsi, le décret n°2022-1673 du 27 décembre 2022, dont certaines dispositions sont codifiées dans la partie réglementaire du code de l’urbanisme, précise le contenu de l’étude d’impact requise pour les actions et opérations d’aménagement soumises à la procédure d’évaluation environnementale, en application de l’article L 300-1-1 du code de l’urbanisme. Elle doit comprendre les conclusions d’une étude de faisabilité « sur le potentiel de développement en énergies renouvelables », ainsi que celles d’une étude sur l’optimisation « de la densité des constructions dans la zone concernée ».
Par ailleurs, ce décret précise les modalités d’inscription du principe de « zéro artificialisation nette » au sein des documents locaux d’urbanisme. Ainsi, s’agissant du document d’orientation et d’objectifs du Schéma de cohérence territoriale (SCoT), il devra localiser « les zones préférentielles pour la renaturation ». Et, en ce qui concerne les PLU, d’une part les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) figurant dans le plan local d’urbanisme (PLU), pourront désormais « identifier des zones préférentielles pour la renaturation et préciser les modalités de mise en œuvre des projets de désartificialisation et de renaturation dans ces secteurs », et ces zonages pourront également être délimités dans les documents graphiques du PLU.
PERMIS DE CONSTRUIRE — taxe sur la création de bureau — data center (NON)
Le Conseil d’Etat a jugé que les données numériques traitées dans des « data centers » ne constituaient ni des biens, ni des marchandises, ni des produits au sens de l’article 231 ter du code général des impôts. Par ailleurs, le fait que ces locaux abritent du matériel et des infrastructures informatiques, ne peut suffire à regarder ces locaux comme étant destinés à une activité d’entreposage. Par conséquent, les locaux hébergeant des serveurs informatiques ne constituent pas des locaux de stockage au sens et des dispositions de l’article L. 520-1 du code de l’urbanisme. Il reste à savoir de quelle destination au sens de l’article R 151-28 du code de l’urbanisme ils relèvent. Une réforme des destinations et sous-destinations est en cours et sera espérons l’occasion de préciser ce point : CE 11 octobre 2022, Ministre de la transition écologique, req. n° 463134 , mentionné dans les tables du recueil Lebon
PERMIS DE CONSTRUIRE — construction en surplomb du domaine public — accord du gestionnaire du domaine joint au dossier de demande — possibilité de régularisation par un permis de construire modificatif (OUI)
Le Conseil d’Etat a rappelé dans deux arrêts du même jour, le contenu de l’obligation pour le pétitionnaire dont le projet de construction comporte des débords en surplomb du domaine public de joindre dans son dossier de demande de permis de construire l’accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d’autorisation temporaire d’occupation du domaine public prévue à l’article R 431-13 du code de l’urbanisme.
Le Conseil d’Etat rappelle ainsi, d’une part, que ladite autorisation est nécessaire même si les surplombs sur le domaine public n’affectent pas son utilisation. Ensuite, il précise que l’omission de cet accord dans le dossier de demande de permis de construire peut être régularisée par l’obtention d’un permis de construire modificatif.
Enfin, le contrôle des services instructeurs ne doit porter que sur la vérification que l’accord figure bien dans le dossier de demande de permis de construire, ces derniers n’ayant pas à s’interroger ni sur le fait qu’en réalité le projet ne nécessitera pas d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public (du fait de la hauteur des balcons en surplombs), ni sur l’éventuelle nécessité de déclasser le terrain au regard des caractéristiques du projet : CE, 23 novembre 2022, n°450008 et CE, 23 novembre 2022, n°449443.
CDAC — nouvelle demande après refus — modifications permettant de redéposer une demande
Aux termes de l’article L. 752-21 du Code de commerce, lorsqu’un projet soumis à permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale fait l’objet d’un avis défavorable de la CNAC pour un motif de fond, une nouvelle demande d’autorisation de construire valant autorisation d’exploitation commerciale sur le même terrain ne peut être soumise, pour avis, à une commission d’aménagement commercial que pour autant que le pétitionnaire justifie que sa demande comporte des modifications en lien avec la motivation de l’avis antérieur de la CNAC. Le Conseil d’Etat précise que la nouvelle demande n’est pas conditionnée par la justification de modifications substantielles, mais que le pétitionnaire est uniquement tenu de démontrer que des ajustements et des précisions, en lien avec les motifs défavorables opposés au projet initial, ont été apportés au projet : CE, 7 octobre 2022, Sté Entrepôt Nîmes et Commune d’Arles, n°450605 et 450636.